TV PAINTINGS
In our previous paintings entitled Séries Américaines [The American Series], we reproduced on a human scale maps of cities located in the American desert, lingering on the cities’ outskirts where information was rare.
We were trying to redefine the iconic field not in terms of the work’s surface area or its limits, but rather by slipping under the cartographic grid or its sighting marks, under the surface of the computer screen.
TAPES (*)
We are interested in the beginnings and the ends of recorded video tapes, that is, in the margins of the image, in the image as it is being formed and deformed.
Photographed in a material in motion, these motifs that are captured on the screen during the unwinding of the tape are then invested within the pictural field.
- SCRATCHES
These deal with accidents visible on the screen, arising from the unwinding of the video tape. These accidents were photographed, then reproduced using cut-out stencils in a homothetic relationship with that of the screen, and finally were treated using several computer imaging programs. The motifs thus generated are represented slightly off-center on the canvas, in such a way as to reflect the scanning movement of the electrons. They are painted both in reserve in the background, then in touched-up highlights in white acrylic. The background of the screen which normally appears black is here painted brown, recalling the color of magnetic tapes. By presenting at the same time the image as it is given to us on the screen and the materiality of the tape, we sought to introduce a new perspective into our work.
- SNOWS
When the tape continues to unwind in the absence of information, the electronic snow is distorted. In treating this information – the passage of the image to the drawing – we chose to reconstitute the image in four layers: in two shades of gray, in black and in white. The result is a kind of finely layered painting. In order to place ourselves on the side of the image (“less than an image”), we separated the constituent layers and retained only certain ones.
- SHADINGS
Within certain electronic snows, one can discern some motifs which share gradual shadings (a progressive passage from one color value to another). Isolated, reframed, enlarged, these motifs become ornamental. By positioning ourselves within the fragment, we abandoned the homothetic relationship and the orientation of the screen. The pictural field shifts towards that of a magnifying glass. Distanced from their referents, they produce shapes that are difficult to identify and that nonetheless seem deceptively familiar to us. The gradual shadings, the ornamentation, the decorativeness, the canonical shapes refer here to the history of painting. What retains our attention is that which in the exterior world speaks to us of painting.
The episodes of Fishing With John #21-25, on the scale of the paintings take us into a curved space that we are barely aware of a vestige of the curvature of the screen.
- EDGES
They originate in an electronic snow, in a narrow line situated at the edge of the image. When enlarged to the utmost, this line, this segment reveals itself to be an incongruous and discontinuous motif. The paintings’ title is that of a film of reference. The many episodes of Fishing With John by John Lurie recount various fishing trips in the company of Jim Jarmush and Tom Waits. When talking about our paintings, one metaphor comes immediately to mind – that of fishing in a limitless ocean. From its surface to the greatest depths, as the darkness deepens, the shapes become more elementary and unusual.
It is not by questioning ourselves about the form that we create new forms, but by inventing new conditions for their emergence – thus giving birth to other figures and other possibilities. It is in this questioning of the image (at the limit of negation) that our reflection lies.
SWITCH
These deal with the moment when the television screen is turned off, when the broadcast is interrupted. What interests us at this moment is the compression of the image; within these luminous and colored shapes, something of the image remains, a memory of the image.
We traveled for many weeks in the United States, (moving from motel to motel), in order to use different television sets. The titles of the paintings refer to the cities we stopped in: Alpine, TX - White’s City, NM - Alamogordo, NM - Santa Fe, NM ... To proceed from the surface of the screen to that of the canvas, we treated the information with a computer: passing from the image to the drawing by means of a computer program of vectorization which enabled us to create cut-out stencils on the scale of our paintings, without losing any definition.
Translated from the French by Jane Mc Donald
(*) We chose the English word “tape,” which means both the magnetic tape of a video and the adhesive we use for the cut-out stencils.
TV PAINTINGS
Dans nos précédentes peintures intitulées Séries Américaines, nous avions reproduit à échelle humaine des plans de villes du désert américain, nous attardant à la périphérie des villes où l’information est rare.
Nous avions tenté de redéfinir le champ iconique non plus par l’étendue du support de l’oeuvre ou sa clôture, mais par le glissement sous la grille ou la mire du cartographe, sous la surface de l’écran de l’ordinateur.
TAPES (*)
Nous nous intéressons aux débuts et aux fins de bandes-vidéo enregistrées, c’est-à-dire aux marges de l’image, à l’image en formation ou en déformation. Photographiés dans une matière en mouvement, ces motifs capturés à l’écran durant le défilement de la bande sont investis ensuite dans le champ pictural.
- SCRATCHES
Il s’agit d’accidents visibles à l’écran, liés au déroulement de la bande. Ces accidents ont été photographiés, puis reproduits au moyen de pochoirs dans un rapport homothétique de celui de l’écran, passant par plusieurs logiciels de traitement des images. Les motifs ainsi générés sont représentés légèrement décalés sur la toile, de manière à signifier le balayage des électrons. Ils sont à la fois peints en réserve, en retrait du fond, puis en rehaut à l’acrylique blanche. Le fond d’écran qui normalement apparaît en noir est ici peint de couleur brune, rappelant la teinte des bandes magnétiques. En mettant en présence à la fois l’image telle qu’elle nous est donnée à l’écran et la matérialité de la bande, nous avons cherché à introduire une nouvelle mise en perspective dans nos travaux.
- SNOWS
Lorsque la bande continue de se dérouler en l’absence d’information, la neige électronique se retrouve déformée. Dans le traitement de l’information - passage de l’image au dessin - nous avons choisi de restituer l’image en quatre couches, soit deux valeurs de gris, un noir et un blanc. Il en résulte une sorte de peinture feuilletée. Afin de nous situer en deçà de l’image (“moins qu’une image”), nous avons dissocié et retenu certaines des couches qui la constituent.
- SHADINGS
À l’intérieur de certaines neiges on remarque des motifs qui s’apparentent à des dégradés (passage progressif d’une valeur à une autre). Isolés, recadrés, agrandis, ces motifs deviennent ornementaux. En nous situant dans le fragment, nous avons abandonné l’homothétie et l’orientation de l’écran. Le champ pictural se déplace dans le sens de la loupe. Éloignés de leurs référents, ils produisent des formes difficilement identifiables et qui néanmoins nous semblent faussement familières. Le dégradé, l’ornementation, le décoratif, la forme canonique font ici référence à l’histoire de la peinture. Ce qui retient notre attention est ce qui dans le monde extérieur nous parle de peinture. Fishing With John #21-25, à l’échelle des peintures nous font pénétrer dans un espace courbe dont nous avons à peine conscience (rémanence de la courbure de l’écran).
- EDGES
Ils proviennent d’une neige électronique, d’une petite ligne située au bord de l’image. Agrandi à outrance, cette ligne, ce segment se révèle constituer un motif incongru et discontinu. Le titre des peintures est celui du film de référence. Fishing With John de John Lurie relate, en plusieurs épisodes, diverses parties de pêche en compagnie de Jim Jarmush et Tom Waits. Une métaphore nous vient immédiatement à l’esprit pour parler de nos peintures, celle d’une pêche dans un océan sans limites. De la surface à la plus grande profondeur, à mesure que s’accroît l’obscurité, les formes deviennent élémentaires et inédites.
Ce n’est pas en nous interrogeant sur la forme que nous entendons créer de nouvelles formes, mais en inventant les nouvelles conditions de leur émergence. Naissent alors d’autres figures et d’autres possibles. C’est dans ce questionnement de l’image (au bord de l’épuisement) que se situe notre réflexion.
SWITCH
Il s’agit de fermetures d’écran, d’interruption de l’émission. Ce qui nous intéresse au moment où la télévision s’éteint, c’est la compression de l’image ; il reste dans ces formes lumineuses et colorées quelque chose de l’image, une mémoire de l’image.
Nous avons voyagé durant plusieurs semaines aux Etats-Unis, changeant de motel, afin d’utiliser différents postes de télévision. Le titre des peintures se réfère aux villes où nous nous sommes arrétés : Alpine, TX - White’s City, NM - Alamogordo, NM - Santa Fe, NM ...
De la surface de l’écran à celle de la toile, nous avons procédé à un traitement informatique des données : passage de l’image au dessin au moyen d’un logiciel de vectorisation nous permettant de fabriquer des pochoirs à l’échelle de nos peintures, et ce sans perte de définition. Peintes au pistolet avec des pochoirs éloignés à des distances variables de la surface picturale, Santa Fe, NM #81c, #118b et 104e apparaissent à différents degrés de flou. Un flou qui redonne du temps à l’image, à cette mémoire de l’image - un temps de lecture dans un espace entre l’image et la lumière.
Anne Marie Jugnet et Alain Clairet
(*) Nous avons choisi le mot anglais “tape”, lequel mot signifie à la fois la bande magnétique et l’adhésif qui nous sert de pochoirs.